Friday, October 8, 2010

Les plantations de thé

    La plupart du thé que l'on boit est issu de théiers de plantation. Dans le Yunnan, on appelle communément ce thé Tai Di Cha. Ce terme a une connotation négative et est très évité dans les magasins.

    En effet, le Tai Di a mauvaise réputation, on le dit arrosé de pesticide, très mauvais à boire, contrôlé par de méchants capitalistes qui se fichent de l'environnement et ne pensent qu'en terme de rendement.

    Depuis que je suis en Chine, je me bas contre les clichés. Aujourd'hui, je vais tenter de démontrer que le thé de plantation dans le Banna n'est pas forcément ce que l'on croit.

Quand on pense Tai Di Cha, on voit ça:


Pas un tif sur le cailloux
   De grandes plantations sur des collines dénudées...

     La biodiversité dans le champ est très importante pour obtenir un bon thé. En effet, les végétaux apportent de la richesse au sol et de la richesse aromatique au thé. S'il n'y a pas d'autres arbres, les insectes se réfugient sur les théiers et peuvent les rendre malades. Dans ce cas, il faut traiter le théier avec des produits phytosanitaires. Si l'écosystème de la plantation est équilibré, il n'y a pas besoin de traiter.

Pas besoin de traiter si l'écosystème est équilibré

    Beaucoup de plantations comportent de nombreux végétaux différents. Il faut se mettre à la place du producteur. Traiter les théiers augmente le rendement, évite la corvée du défrichement à la main, facilite les déplacement dans le champs. Mais ces produits phytosanitaire ont aussi un certain coût, rendent le producteur dépendent et fragilisent l'environnement. Il est finalement assez risqué d'avoir une plantation dénudée d'autres arbres. D'autant plus que le mao cha issu de ces plantations se vend à un prix ridicule... Un petit producteur a tout intérêt à favoriser la qualité au profit de la quantité et la plupart agissent de la sorte.


Dans le nord d'Yiwu

Aux alentours de Menghai
    Les plantations en terrasse sont le modèle le plus répandu. Sur un champ en terrasse, on peu planter les théiers très serrés pour un maximum de rendement à l'hectare. De plus, cela rend la cueillette très facile: on peut récolter plus de dix kilos de feuilles fraîches par heure. La contrepartie est que les théiers ont peu d'espace pour se développer et sont en compétitions les uns les autres. Le thé sera donc de qualité inférieure.



    Cependant, on trouve d'autres modèles de développement. Certaines plantations laissent plus d'espace aux théiers. La compétition est plus faible, les théiers ont plus de nutriments pour se développer.



Ces théiers ont de la place pour se développer

Ici, les théiers ne sont pas organisés en terrasses
    Enfin, dans certains cas, on laisse pousser le théier librement, sans le tailler. Cela rend la cueillette plus difficile mais rend le thé plus endurant.


Ces théiers ne sont pas taillés

    Ainsi, je pense que le thé de plantation doit aussi trouver sa place chez l'amateur de thé, il n'y a pas que du mauvais Tai Di. D'ailleurs, il n'est pas si facile de faire la différence entre certaines vieilles plantations et du théier sauvage.

    Les vieux théiers gardent tout de même des atouts majeurs face aux jeunes plantations. Ils sont plus endurant, souvent plus puissants et complexe et surtout, je trouve qu'ils procurent de meilleurs sensations. Les jeunes théiers ont une fâcheuse tendance à tout balancer dans les trois premières infusions puis à devenir très astringents et plats.
Huimin, près de Jingmai

    Visuellement, il est très difficile de faire la différence entre thé de plantation et thé sauvage. L'apparence du thé dépend surtout du type de feuilles et de la manufacture. Cela dit, je trouve que souvent, les feuilles de Tai Di sont plus agréables à l'œil que les feuilles de théiers sauvages. Gouter le thé reste encore la méthode la plus efficace pour les distinguer.

    Cela dit, je pense que si on boit du thé pour le plaisir,il vaut mieux l'apprécier sans activement chercher à faire la différence entre théiers sauvages et théiers de plantation. Mieux vaut se dire: « a cet instant T, j'aime ce thé et pas celui là ». Je pense que l'expérience fera le tri elle-même. D'ailleurs, je constate que certains buveurs occasionnels préfèrent le Tai Di au Gu Shu parce qu'ils ne font pas quinze infusions et que finalement, un blend de Tai Di comme le font les grandes manufactures, cela peut donner de bons résultats.

2 comments:

  1. J'ai lu quelque uns de vos billets, et j'avoue avoir du mal à vous suivre...

    Vous écriviez il y'à quelque jours "Malheureusement, la plupart de ces théiers n'ont qu'une dizaine d'année. Ce n'est pas très buvable... Rendez vous dans trente ans!" et maintenant vous dites que les jeunes arbres font aussi du bon thé et qu'il est difficile de faire la différence entre jeune arbres et arbres sauvages...

    Pouvez vous aussi nous éclairer par ce que veux dire "un blen de tai di comme le font les grandes manufactures"? quand on habite pas comme vous en chine c'est un peu opaque...

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  2. Bonjour Miao,

    Deux questions très intéressantes!

    Tout d'abord, dix ans, pour un théier, c'est vraiment très jeune. Je dirais qu'il faut au minimum trente ans pour avoir quelque chose de bien. Cela dit, je manque encore d'expérience a ce sujet.

    Quand les arbres sont jeune, ils ont un arôme peu puissant, ils ne sont pas endurants. Ils me paraissent assez pauvres. Après quelques infusions, ils deviennent souvent assez astringents et ne donnent plus rien.

    Avec l'age, ils deviennent plus endurants, ils ont plus de matière a donner. Les sensation procurées par le thé sont différentes.

    Les feuilles de très jeunes théiers sont souvent destinées a faire du thé fermenté ou est mélangé a d'autres thés.

    Autre paramètre important: l'environnement. Il y a des théiers de trente ans qui donnent du bon thé, d'autre du mauvais. L'altitude, le sol, la biodiversité. Tout cela a une influence sur le thé.

    Autre point important. Il ne faut pas faire la confusion entre théier sauvage/plantation et jeune/vieux théier.

    Dans une foret de théiers sauvages, les théiers se reproduisent naturellement, comme dans toute population, on trouve des jeunes et des vieux arbres. Quand on boit du théier sauvage, ce n'est pas toujours des arbres de 400 ans.

    Chaque foret de théiers a une histoire. Chaque situation est différente. Par exemple a Jingmai, les vieux arbres sont concentrés au sommet de la montagne et a mesure qu'on descend, on trouve des théiers de plus en plus jeunes. Le thé issu bas de la montagne est donc différent de celui issu du sommet.


    Concernant le blend de Tai Di comme le font les grandes manufactures...

    Un blend, c'est un thé dont les feuilles proviennent de plusieurs région, comme un cocktail. On mélange des thés issus de plusieurs montagnes pour créer des gouts uniques. Souvent pour améliorer la qualité de feuilles bon marché. Les thés de plantations ont tendance a être très extrêmes dans les arômes qu'ils donnent, on peut donc équilibrer ces arômes en les mélangeant.

    Tai Di (台地,prononcer "taille dit"), c'est le chinois pour dire "théier de plantation". C'est plus court a dire et puis, ça fait pro...

    Dans le même registre, on peut dire Gushu (古树,"goût choux") ou Dashu (大树,”ta choux") pour designer le théier sauvage.

    Les grandes manufactures (Dayi, Haiwan, Xiaguan...) produisent souvent du Pu Er bon marché. Voila pourquoi ils achètent du Tai Di qui ne coute pas cher. Pour améliorer leur thé, ils mélangent les Tai Di de différentes régions et créent des recettes, souvent avec des numéros a quatre chiffres genre 7572 ou 8582. Voici comment au final, on peut produire du thé potable avec du Tai Di.

    Si ce n'est pas clair, je peux expliquer plus en détail.

    A bientôt!

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