Yiwu est sans doute la montagne à thé la plus connue dans le monde du Pu Er. C'est la plus importante des six grandes montagnes à thé. La figure de proue de l'industrie du Pu Er en quelque sorte.
Yiwu est le nom d'une petite ville à laquelle est rattachée une zone très vaste: il y a beaucoup de villages et donc beaucoup de thé différents.
La rue principale d'Yiwu |
Sur les contreforts d'Yiwu, on remarque une quantité très impressionnante de Tai Di sans biodiversité. Encore une fois la contrepartie d'une forte popularité.
Sur la route d'Yiwu |
Le terroir le plus populaire de Yiwu est situé aux alentours de la ville principale. Mahei est le village le plus connu, il est situé à neuf kilomètres de Yiwu. Autour de Mahei, on trouve les villages de Luo Shui Dong, Da Qi Shu et Man Xiu. Les quatre villages ont des caractéristiques semblables. On peut les regrouper sous un même terroir. C'est de ce terroir que provient la majorité du Gu Shu d'Yiwu.
Aux alentours de Mahei |
Cette zone est majoritairement peuplée par les Han: les vrais chinois. Cela explique l'architecture différente des habitations. Les théiers sont situés au sommet de la montagne, ils ne se trouvent pas à l'intérieur d'une forêt mais dans des zones défrichées aux alentours des villages.
Ils sont taillés pour faciliter la récolte, par conséquent, vous verrez peu de grands arbres à Mahei. La pente est par endroit importante mais le terrain est très dégagé. La cueillette est assez facile.
Certaines pentes sont très abruptes |
On peut considérer ces théiers comme semi-sauvages. Certains sont centenaires, ils ont beaucoup d'espace pour se développer mais sont tout de même très entretenus. Ce terroir n'offre qu'une qualité de thé: Les jeunes arbres et les vieux théiers sont récoltés ensemble. Il n'y a pas de Tai Di non plus.
Presque tout le thé de Mahei provient de ce genre de théier |
Sur la route de Mahei, on pourra croiser un petit chemin pavé: c'est l'ancienne route du thé. Elle passe par tous les villages des six grandes montagnes à thé puis traverse toute la Chine pour se rendre à Lhassa, Pékin et Canton. Autrefois, les galettes étaient amenées à dos d'âne à Pékin pour être offertes comme tribut à l'empereur ou vendue à prix d'or aux amateurs. Ce voyage nécessitait plusieurs mois. Cela aide à comprendre pourquoi on compresse le Pu Er au lieu de le transporter en feuilles entières.
Un théier survivant sur l'ancienne route du thé |
Au nord de ce premier groupe de villages, la région est beaucoup plus sauvage, les routes sont en mauvais état, peu praticables par temps de pluie. Les paysages sont magnifiques: de grandes collines très abruptes et couvertes d'une jungle dense. Le Laos n'est qu'à quelques dizaines de kilomètres.
On croise peu de monde, on voit peu d'habitations. Cette zone est majoritairement peuplés de Yao. Cette ethnie est peu présente en Chine. Dans le Banna, on la trouve dans l'Est, aux frontières du Laos. Les Yao n'enferment pas les animaux. Cochons, poules et chiens se baladent en liberté sur les routes et dans les villages. Cela se ressent dans la qualité de leur viande: les animaux ne sont pas stressés. Cela pose aussi quelques problèmes d'hygiène.
Comme chien et chat |
Cette partie d'Yiwu est vraiment en retrait, très peu de touristes la visite, la plupart des acheteurs viennent de Taiwan et de Canton. Quinze ans auparavant, le thé ne coûtait presque rien. Les Yao ont donc décidé d'abattre beaucoup de vieux arbres pour planter du riz. Autant dire qu'ils s'en mordent les doigts aujourd'hui...
Ding Jia Zhai, un village Yao |
Il faut marcher deux heures pour accéder a ces théiers |
Cet éloignement protège les théiers de toute pollution mais cela pose aussi des problèmes de manufacture...
Sur la montagne d'en face, on peut apercevoir les champs de Gua Feng Zhai, il faut marcher quatre heures pour y accéder. Notez les petites maisons dédiées a la manufacture. |
En effet, les habitants d'Yiwu ne sont pas très branchés nouvelles technologies. Il y a peu d'ateliers de traitement dans la région, cela signifie que chaque famille traite ses feuilles elle-même. Les infrastructures sont assez rudimentaires: pas de Sha Qing Ji, pas de machines à rouler et peu de serres. Pendant la saison des pluies, le thé a beaucoup de problèmes. Il met trop de temps à sécher et cela donne des Pu Er légèrement acides et peu aromatiques. Par temps de pluie, il faut environ trois jours pour que le thé soit suffisamment sec. En plein soleil, une poignée d'heure suffit.
Le séchage est une étape importante |
Aussi, certains thés sont contaminés par des odeurs étrangères, ils peuvent avoir un goût de fumée. Cela peut être dû à un stockage dans un endroit mal approprié ou à une mauvaise ventilation lors du Sha Qing. Encore une fois, du fait de la montée des prix, certains producteurs essaient d'améliorer leurs techniques de traitement. Beaucoup restent tout de même trop négligents.
Aire de repos près des théiers de Gua Feng Zhai |
Encore plus au nord, à la frontière du Banna et de Simao, on arrive à Man La. Un grand village, plus petit que Yiwu. Aux alentours, on trouve des Han, des Yao, des Yi, des Hani, des Dai... Yiwu est la montagne la plus diverse en terme d'ethnies. Dans cette zone, beaucoup de Tai Di. Des jeunes comme des vieux. Une part infime de très vieux arbres, loin dans la forêt. Mais surtout, beaucoup de plantations d'hévéas.
Encore une fois, il semble que le thé ne soit pas la production principale dans les six grandes montagnes à thé. Ces montagnes ont une histoire mais vivent sur leur passé. Il ne reste que peu d'arbres anciens et laissés à l'état sauvage. Le lieu de production principal du Pu Er, c'est surtout l'ouest du Banna et la région de Simao. Pourtant, tout amateur de Pu Er a entendu parler d'Yiwu. Cela explique pourquoi les galettes de cette région peuvent atteindre des prix très importants. Bien souvent en Chine, le nom est plus important que la qualité...
Il reste très peu de grands arbres a Yiwu |
Le thé d'Yiwu est en général peu amer. Je trouve que même s'il est assez doux, ils provoque beaucoup de sensations physiques. A mon sens, le plaisir de ce terroir est à chercher dans la bouche et à l'entrée de la gorge. Ce n'est pas le genre de thé qui descend très profond. Il est plutôt du genre à s'étaler sur le palais en provoquant un assèchement agréable de la bouche: le Kou Gan. Les arômes peuvent persister plusieurs heures. Il faut le boire pour le croire!
Comme beaucoup d'autres terroirs du Xishuangbanna, ce genre de thé n'est pas particulièrement aromatique. Cela n'explose pas dans la bouche comme un Pu Er de Lincang ou un wulong. C'est un thé qu'on boira surtout pour les sensations en bouche et le feeling.
Yiwu, c'est la force tranquille...
Au bout du monde... |
No comments:
Post a Comment