En général, on récolte les feuilles pendant la journée puis les traite à la tombée de la nuit. Pour des raisons pratiques, il arrive que certains producteurs fassent la manufacture le matin. Voici un petit exemple, dans le village Lahu nommé Banpen, à deux pas de Lao Banzhang.
Dans ce village, il n'y a que trois ateliers de traitements. Ils achètent les feuilles fraîches aux autres familles puis les traitent dans leurs grands ateliers. Ce modèle permet un traitement plus rigoureux des feuilles, qui sont accueillies dans de belles infrastructures.
Les feuilles fraiches ont patienté toute la nuit. Leur heure est venue...
On traite les feuilles fraîches par fournées de deux ou trois kilos. Le sha qing fait en wok va durer quelques minutes. Chaque personne a sa technique: certains le font à feu doux, en brassant lentement les feuilles, d'autres préfère une température plus élevée et remuent énergiquement les feuilles.
Une odeur magique se dégage, on peut la retrouver quelquefois dans de très jeunes thés. Ce parfum végétal est aussi un repère pour l'artisan. Il faut savoir arrêter le sha qing au bon moment. Pas assez et les feuilles auront un goût végétal caractéristique couplé à de l'acidité; trop et elles auront un goût de brûlé. Il n'y a pas de chronomètre, tout se fait à l'oeil et au toucher.
Ici, l'artisan n'utilise pas de gants, je me demande bien comment il fait. Le wok est très chaud et il faut presque en toucher le fond pour éviter que des feuilles ne prennent sur les parois. Même avec des gants, cela reste délicat. Il faut de l'entraînement pour ne pas se brûler. On ressort souvent trempé de sueur d'une séance de sha qing. Quand on manufacture à la main, il faut vraiment donner de sa personne pour obtenir un bon thé.
Quand on sort les feuilles du wok, elles sont légèrement poisseuses, il faut s'assurer que l'eau s'évapore au maximum. On éparpille les feuilles sur une grande natte en bambou tressé. Après quelques minutes de repos, on passe à l'étape du roulage. Ici, les feuilles sont d'abord passées dans une petite machine à rouler puis elles sont massées à la main.
Une fois le roulage terminé, place au séchage. Dans cet atelier, un bâtiment lui est spécialement consacré. Les feuilles sont légèrement roulées à nouveau afin de d'obtenir un mao cha agréable à l'oeil. Elles sont ensuite étalées dans des jattes puis mises à sécher sous un toit transparent.
Les feuilles vont rester ainsi jusqu'à ce qu'elles soient suffisamment sèches. Cela dépend beaucoup de la météo. Si le ciel est dégagé, elles seront retirées le lendemain.
...
Un de mes articles préférés de ton blog.
ReplyDeleteÊtre en direct, comme ça, dans une manufacture c'est de l'investigation véritable. Et puis il y a qqch de vivant, on est là avec eux.
A propos du Sha Qing :
"Il n'y a pas de chronomètre, tout se fait à l'oeil et au toucher."
Vu de l'extérieur cela parait spectaculaire, mais la difficulté ne doit pas être plus grande que de déterminer la cuisson d'un plat à l'oeil.
Par contre le faire sans gants, là, chapeau bas.
Merci William de cet excellent article.
Nicolas
Belle présentation pour ce blog...il y a comme quelque chose de nouveau dans la forme.(?)
ReplyDeleteComme Nicolas c'est agréable de se sentir en immersion certes "virtuelle" mais dans le Yunnan.
Au plaisir de te suivre...
. PHILIPPE .
Bonjour William,
ReplyDeleteje voudrais te remercier pour ton blog inappréciable, qui n'a à ma connaissance pas d'équivalent sur Internet. Chacun de tes articles est un regard passionnant et nouveau sur l'envers de mon quotidien : pour moi (pour nous autres amateurs de thé occidentaux), le thé est un sachet de feuilles sèches ou une galette, puis un rituel de préparation, une boisson délicieuse, et quelquefois un moment partagé entre amis. Il peut être encore un sujet de discussion et d'échange, une ruine pour les finances, et aussi un mystère, souvent. Mais grâce à tes articles, dont celui-ci, le thé prend d'autres couleurs et un autre quotidien. Il devient aussi ces belles montagnes dans la lumière du matin, ces forêts étonnantes, ces variétés concurrentes ; et ma petite tasse se remplit d'une querelle de voisinage, de la fierté d'une ethnie, du résultat de transformations multiples et difficiles.
Par ailleurs, la précision de tes reportages permet de rétablir un certain nombre de nuances que l'éloignement rendait imperceptibles. Le fait que les méthodes de préparation (le séchage mécanique ou manuel, privé ou commun, les méthodes de torréfaction, etc.) soient si disparates, et que les appellations puissent en fait regrouper des réalités aussi complexes aide à bousculer un certain nombre d'idées reçues. La tasse de thé n'en est que plus complexe et vivante.
Merci beaucoup !
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ReplyDeleteJ'ai changé un peu la forme du blog, de cette façon, les grandes photos ne viennent pas grignoter sur les noms des autres blogs.
Il faut bien garder à l'esprit que mes articles sont simplement le fruit de quelques visites. Il est très difficile d'avoir une vision objective des choses.
Pour apprendre sur le thé, il faut se renseigner auprès de plusieurs sources. Souvent, les informations ne se recoupent pas...
L'amateur de thé doit donc faire preuve de beaucoup de prudence, surtout en lisant des informations sur internet.
Le mieux est encore d'apprendre le chinois et de prendre l'info à la source.
Dans mon blog, j'essaye d'expliquer les choses comme je les comprends mais je ne prétends pas détenir la vérité.
Parler thé, c'est comme parler religion ou politique. On discute, on se contredit, on se dispute et au final, on n'avance pas beaucoup... mais c'est rigolo.
Merci à tous les lecteurs!